Bio_jakub
Né dans le sud-est de la Pologne deux ans avant l’explosion nucléaire à Tchernobyl, Jakub passe une enfance paisible en grandissant à la campagne aux côtés de sa mère surprotectrice et de son père carrossier, autoritaire mais inspirant. Il a un frère plus jeune David qui a fait l’école buissonnière. Tous deux ont appris à conduire très jeunes. Une fréquente sensation de vivre loin du monde l’amène avec le temps à s’intéresser aux livres, car ils lui permettent de s’évader, de voyager à peu de frais et surtout sans demander la permission à ses parents. Dans les livres, il découvre des mots qu’on dit pas chez lui, puis il observe comment les autres, les auteurs triturent la langue. Collégien il suit des cours d’allemand, mais cela ne mène à rien, pas même une prise de conscience que ça serve à quelque chose d’autre que passer d’une classe à l’autre. Ce n’est pas le cas pour ses cours particuliers d’anglais, là il tilte que derrières les mots il y a une promesse de nouveaux mondes. Le français enseigné au lycée lui offrira ses premières émancipations. En terminale, son père lui paye l’année à l’Alliance française. C’est à la bibliothèque de l’Alliance qu’il emprunte son petit dico Hachette qu’il usera jusqu’à la corde. Sa famille ne le sait pas encore, mais dans sa tête il n’habite plus dans le même pays. Il découvre le désert avec le marocain Tahar Ben Jelloun, la joyeuse vie de polisson avec le Petit Nicolas, la subversion de l’écriture avec Georges Perec et Robe-Grillet, la science-fiction non américaine avec Barjavel. Il est dérouté par la traduction d’œuvres qu’il avait connues dans sa langue natale et désormais sera fasciné par le rôle presque chamanique de traducteurs. Il emportera toujours avec lui les sublimes Boutiques de cannelle dans la traduction de Lisowski. Longtemps il restera épaté par ceux qui choisissent d’écrire directement en français, comme c’est le cas pour Jean Potocki et son Manuscrit trouvé à Saragosse. Il ira vivre en francophonie. Pour cela, il s’inscrira en philologie romane à la fac des lettres et langues, où il suivra pendant cinq années une maîtrise en didactique de français et d’italien. En troisième année de fac, après un séjour d’ouvrier saisonnier en Italie à découvrir des dialetti, et un voyage en Grèce à tester ce qu’il a appris en autodidacte du grec moderne, s’offre à lui l’opportunité d’aller en France faire un stage de six mois comme assistant culturel en collège, de ZEP rurale, dans les Deux-Sèvres. Ce sera son initiation au métier d’animateur, passeur, relais. De retour à sa faculté d’origine, il y fait la découverte du fantastique belge à travers le roman Malpertuis du flamand Jean Ray. Ce roman d’épouvante écrit avec un lexique rare et archaïsant, inspiré de mythologie grecque, mettant à nu les mécanismes cognitifs à l’œuvre lors de la lecture, choque par son côté interactif et ludique, sa structure alambiquée et son fort degré d’intraduisibilité. Fasciné par cette œuvre, il décide d’entreprendre sa traduction en polonais et ce sera un chantier long de plus de dix années, jusque sa publication à Cracovie en 2021. Le genre littéraire qu’il aura lui-même le plus pratiqué en français est la lettre de motivation. Certaines ont beaucoup joué. Celle pour retourner à Poitiers comme Erasmus en LEA, celle pour intégrer un master pro en Tourisme Patrimoine et Multimédia, celle pour faire son stage à la Marchoise, ce qui au final l’a amené y faire près de 5 ans de contrats comme animateur-documentaliste, celle pour enseigner le polonais à la Fac de Poitiers. Outre ces occupations, il fera du doublage et du sous-titrage de films dans le cadre du festival Filmer le travail ou pour des séances de cinéma polonais à l’Université, il fera l’interprète pour des assos de jumelage, tout en vendant entre temps sa force de travail aux plateformes téléphoniques EDF ou IMA Niort. Son lien avec le monde associatif et l’éducation populaire lui permettent aujourd’hui de travailler sur la matière linguistique dans le domaine ethnographique auprès de l’UPCP–Métive, où il développe un outil pédagogique pour le poitevin. Il lit Alain Rey, San Antonio et aime les ateliers de désintox à la langue de bois.